Depuis sa sortie en 2022, Le Mage du Kremlin, premier roman de Giuliano da Empoli, ne cesse de faire parler de lui. Finaliste du Prix Goncourt, salué pour son écriture et sa puissance d’évocation, il continue en 2025 d’alimenter les débats autour du pouvoir, de la manipulation et du rôle de la fiction dans la politique. Mais pourquoi un roman suscite-t-il autant de réactions ? Qu’a-t-il de si dérangeant ?
Voici les raisons pour lesquelles Le Mage du Kremlin est bien plus qu’un simple succès littéraire : c’est un objet de controverse, entre fascination et inquiétude.

Un roman inspiré de faits réels
Giuliano da Empoli, ancien conseiller politique en Europe, s’inspire de la trajectoire d’un personnage réel : Vladislav Sourkov, ancien idéologue du Kremlin et stratège de Vladimir Poutine. Dans le roman, il devient Vadim Baranov, narrateur et figure centrale de cette fresque du pouvoir russe.
À travers son récit, le lecteur plonge dans les coulisses du pouvoir autoritaire russe, où manipulation des masses, contrôle de la réalité et usage cynique des émotions deviennent des armes politiques.
La frontière entre fiction et vérité est volontairement floue. Et c’est là que commence le débat.
Une lecture qui fascine… et qui inquiète
Ce qui dérange dans Le Mage du Kremlin, ce n’est pas tant son style – sobre, incisif, élégant – que le regard qu’il porte sur la politique et la démocratie. Plusieurs critiques pointent :
- Une forme de fascination pour le cynisme du pouvoir russe, présenté comme un jeu d’échecs maîtrisé
- Une absence de jugement clair sur les dérives autoritaires, qui peut troubler certains lecteurs
- Le risque que certains y voient une admiration déguisée pour la stratégie poutinienne
Certains y lisent un avertissement lucide sur la fragilité de nos démocraties, d’autres une mise en valeur ambiguë d’un système de domination.

Une œuvre politique, mais pas militante
Giuliano da Empoli a toujours affirmé qu’il ne s’agissait ni d’un pamphlet, ni d’un manifeste pro-russe, mais d’un roman d’observation, inspiré de faits réels, certes, mais traversé par une distance littéraire.
Le livre pousse à la réflexion : jusqu’où peut-on manipuler les émotions d’un peuple ? Peut-on gouverner par la fiction ? Et surtout : la démocratie est-elle encore capable de rivaliser avec le storytelling du pouvoir autoritaire ?
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Pourquoi ça fait débat en France (et ailleurs)
Le roman a été vivement commenté par des intellectuels, journalistes, enseignants… notamment en France, en Italie et en Suisse. Les points de tension récurrents :
- La proximité avec l’actualité géopolitique (guerre en Ukraine, autoritarisme croissant)
- Le succès du livre dans certains cercles politiques, qui l’utilisent comme miroir ou justification
- L’esthétique du pouvoir froid, qui séduit autant qu’elle effraie
Certains professeurs de philosophie l’ont recommandé à leurs élèves, d’autres l’ont critiqué comme “dangereux” ou “trop complaisant”.
En résumé
Le Mage du Kremlin n’est pas un roman neutre. Il questionne les rapports entre pouvoir, fiction, idéologie et vérité. Il ne donne pas de réponse, mais met le lecteur face à ses propres convictions, à ses propres craintes.
C’est précisément ce flou, cette ambiguïté subtile, qui dérange autant qu’il captive. Et qui explique pourquoi, en 2025, ce livre continue de faire débat.


































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