Le pouvoir intrigue et fascine depuis toujours. Bien qu’il permette de prendre des décisions importantes et d’influencer le cours des choses, il peut également transformer profondément ceux qui le détiennent.
Mais pourquoi le pouvoir change-t-il les gens ? Que disent la psychologie et les neurosciences sur ce phénomène ? Dans cet article, nous explorerons les effets du pouvoir sur le comportement et le cerveau, en nous appuyant sur des recherches solides.

Le pouvoir révèle ou transforme-t-il ?
On entend souvent dire que le pouvoir ne transforme pas les individus, mais qu’il révèle leur véritable nature. Pourtant, des études montrent que le pouvoir change réellement la façon dont une personne pense et agit, et même comment son cerveau fonctionne. Selon Dacher Keltner, professeur de psychologie à l’Université de Californie, « le pouvoir diminue la capacité à comprendre les émotions des autres », ce qui peut entraîner une perte d’empathie et une distance avec son entourage (Keltner, 2016).
Quand une personne obtient une position de pouvoir, elle bénéficie d’une liberté accrue. Mais cette liberté peut également conduire à des excès, comme un comportement plus égoïste ou moins respectueux des normes sociales. Le pouvoir, bien utilisé, peut révéler le meilleur d’une personne ; mais sans contrôle, il peut accentuer ses défauts.
Les pièges de l’autorité : une déconnexion sociale
Lorsqu’une personne accède à une position d’autorité, elle peut rapidement tomber dans des pièges psychologiques et comportementaux. Voici quelques-uns des risques identifiés par les chercheurs :
- Réduction de l’empathie :
Des études ont montré que les individus en position de pouvoir ont tendance à moins se soucier des émotions et des besoins des autres. Cette diminution de l’empathie est liée à une réduction de l’activité dans le cortex pariétal, une zone du cerveau impliquée dans la perception des sentiments d’autrui (Obhi et al., 2014). - Surconfiance et impulsivité :
Le pouvoir peut générer un excès de confiance en soi, rendant les personnes plus susceptibles de prendre des décisions impulsives ou risquées sans consulter les autres. Adam Galinsky, chercheur en psychologie sociale, a démontré que les individus au pouvoir avaient tendance à ignorer les perspectives différentes et à imposer leurs propres idées (Galinsky et al., 2003). - Distance émotionnelle :
Les relations humaines peuvent devenir plus superficielles sous l’effet du pouvoir. Le sentiment de supériorité peut mener à l’arrogance, et la peur de perdre cette position peut pousser à manipuler ou dominer les autres.
Ces comportements ne sont pas systématiques, mais ils apparaissent souvent en l’absence de mécanismes de régulation, comme des feedbacks réguliers ou un environnement équilibré.

Les effets du pouvoir sur le cerveau
Le pouvoir change littéralement le fonctionnement du cerveau. Voici quelques découvertes scientifiques clés :
- Activation accrue du système de récompense :
Le pouvoir active les circuits de la récompense, notamment grâce à la libération de dopamine. Cette stimulation explique pourquoi certaines personnes cherchent à maintenir ou à augmenter leur pouvoir, parfois de manière compulsive (Keltner, 2003). - Diminution de la sensibilité sociale :
Le cortex pariétal, responsable de la reconnaissance des émotions et de l’empathie, fonctionne différemment chez les personnes en position d’autorité. Cette altération peut réduire leur capacité à percevoir et comprendre les sentiments d’autrui (Obhi et al., 2014).
Ces mécanismes montrent que le pouvoir n’est pas qu’une simple expérience sociale ; il transforme également la biologie des individus.
Peut-on échapper aux pièges du pouvoir ?
Bien que le pouvoir change les gens, il est possible de minimiser ses effets négatifs. Voici quelques stratégies efficaces pour y parvenir :
- Pratiquer l’introspection :
Prendre le temps de réfléchir à ses décisions et à leurs conséquences aide à éviter les comportements impulsifs ou égoïstes. - Encourager les feedbacks :
S’entourer de personnes capables de donner des avis honnêtes est essentiel pour garder une perspective équilibrée. - Cultiver l’humilité :
Reconnaître ses limites et accepter la critique permet de rester connecté à la réalité. - Développer l’intelligence émotionnelle :
Travailler sur sa capacité à comprendre et gérer ses émotions – ainsi que celles des autres – aide à limiter les effets négatifs du pouvoir.
Conclusion : un pouvoir à double tranchant
Le pouvoir est un outil puissant, capable de produire des changements positifs lorsqu’il est utilisé de manière éthique et responsable. Cependant, il s’accompagne de nombreux risques, notamment la réduction de l’empathie, la prise de décisions impulsives, et la déconnexion sociale. Ces transformations ne sont pas inévitables, mais elles nécessitent une vigilance constante et un effort pour rester aligné avec ses valeurs.
Les recherches en psychologie et en neurosciences nous rappellent que si le pouvoir change les gens, il peut aussi être un révélateur. Ce sont les choix que nous faisons face à cette influence qui déterminent véritablement qui nous sommes.
Sources utilisées :
- Keltner, D. (2003). The Power Paradox: How We Gain and Lose Influence.
- Obhi, S. S., Swiderski, K. M., & Chambers, C. T. (2014). Power reduces the neural encoding of others’ emotions. Psychological Science.
- Galinsky, A. D., Magee, J. C., Inesi, M. E., & Gruenfeld, D. H. (2003). Power and perspectives not taken. Psychological Science.


































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